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Censure de la série Rebelles : le débat sur la censure cinématographique refait surface au Sénégal

Faut-il censurer ou au contraire tout montrer tant que c’est du domaine fictif ? Les censures les plus récentes que le Sénégal a connues dans le cinéma sont principalement en rapport avec les mœurs et venant d’organisme de défense de valeurs religieuses, mais cette nouvelle censure est différente. 

Délivrée par la direction de la cinématographie sénégalaise, elle apporte une autre explication, celle du bafouement des règles républicaines qui régissent un pays, celle de la diversité et de la non stigmatisation. La direction de la cinématographie n’a pas donné beaucoup d’information sur les raisons d’une telle décision mais il suffit de s’y pencher pour relever des dissonances qui résonnent sur la toile où la bande annonce publiée le 31 août dernier( supprimé par Marodi mardi le 20 septembre dans la journée) comptabilisait plus de 200.000 vues.

L’histoire est particulière avec cette nouvelle série signée Marodi x Canal+ pour la chaîne Sunu Yeuf. Les moyens y sont, l’histoire également mais quelle histoire?

Synopsis : A la faveur d’un remaniement ministériel, Moïse Adjodjena Badji, jeune politicien prometteur, est promu au poste très convoité de Chef de Cabinet du Président de la République… (Mais) il se retrouve “ au cœur d’un complot au plus haut sommet de l’Etat, dont le but est de créer l’instabilité en Casamance afin de servir des intérêts privés”. 

A l’annonce de ces trois mots “instabilité en casamance”, l’histoire prend un autre sens. Elle s’inspire de faits réels qui sont toujours d’actualités. Cette histoire va plus loin, elle narre une histoire de complot, de magouilles au sein de l’Etat et de forces extérieures qui pourraient tirer avantage de cette “instabilité en Casamance”. 

La série met en action un jeune acteur, son nom “ethnique” renvoie à la communauté “joola” et revient à conforter certaines allégations taxant cette communauté majoritaire en casamance de « rebelle ».

Récemment dans l’actualité sénégalaise lors de l’entrée en fonction de la 14ème législature au parlement, Alphonse Mané Sambou, le député de la commune de Oussouye (Ziguinchor) qui arborait un chapeau ethnique de la même communauté “joola” du Kassa (Casamance) a été la cible de Madiambal Diagne. 

Le patron de presse s’indignait de la présence des disciples de L’abbé Diamacoune Senghor, chef historique du mouvement indépendantiste de la Casamance, à l’Assemblée nationale. M. Diagne a par la suite admis son tort mais ce ne sont pas les premières attaques ethniques de ce genre sur la sphère politique. L’opposant Ousmane Sonko est souvent taxé de “rebelle de la casamance”, car originaire de cette partie du pays.

Selon les analyses et les réactions des internautes, il y a deux façons d’appréhender cette histoire. Une partie soutient que la série est un bon exemple de dépassement de l’histoire du conflit en casamance et des complots en politique qui relèvent du domaine fictif et une autre estime que c’est une discrimination et un acharnement envers une communauté ethnique et le récit d’une histoire biaisée par des suppositions d’un conflit toujours d’actualité.

“C’est une imagination irresponsable. Il est inadmissible de tourner une série ayant trait avec le conflit casamançais alors que les plaies sont béantes. Le film est tourné en casamance, le principal acteur est un diola et l’éthnie diola est au cœur de toute la série. Une stigmatisation pure et simple d’une région et d’une éthnie”, s’est indigné un internaute.

Un autre fait valoir le pouvoir du cinéma qui ne doit pas être soumis à la censure. “Vous voulez légaliser la censure dans ce pays? Elle est où votre démocratie tant chantée et la liberté d’expression?” s’interroge-t-il en donnant en exemple les grandes franchises du cinéma telles que Hollywood où des films sont tirés d’événement réels.

Dans cette situation, la liberté de mettre sur pied des produits culturels qui parle à la société et inspirée de l’environnement immédiat est un devoir pour les créateurs mais la stigmatisation d’une communauté qui subit déjà des préjudices à cause du conflit casamançais qui a ravagé l’économie locale et jeté une ère de méfiance envers cette communauté est un autre pan à prendre en compte.

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