L’état d’exception est une suspension de certaines garanties juridiques, prévue par la Constitution et/ou la loi du pays qui l’applique, pour faire face temporairement et localement à une circonstance exceptionnelle, par exemple, une restriction à la liberté de mouvement en cas de catastrophe naturelle.
Depuis quelques mois la junte au pouvoir semble appliquer une règle autre que la norme à l’exercice de la presse. L’expulsion des deux correspondants de Libération et du Monde le 1er avril 2023, révèle un peu la volonté de conditionnement de la presse dont les nouvelles autorités font preuve. La direction du Monde s’indigne des expulsions qu’elle qualifie d’« inacceptables ». « Notre correspondante décrit depuis plusieurs années, par des enquêtes fouillées et donnant la parole à toutes les parties, la situation au Burkina Faso. La précision de ce travail, récemment récompensé par un Prix Varenne, a visiblement fini par paraître insupportable au régime d’Ibrahim Traoré, président de transition depuis six mois », a-t-elle déclaré.
La tendance montre une sorte d’acharnement sur les médias étrangers en l’occurrence français. Mais en réalité, c’est toute la presse burkinabé qui se trouve visée. La situation de guerre dans laquelle se trouve le Burkina Faso est le prétexte que brandit le gouvernement. Or, « En temps de paix ou de guerre, la production de l’information ne change pas. Ce sont les mêmes contraintes de sélection des menus en conférences de rédaction, de discussion et d’échanges entre journalistes sur la nécessité ou pas de traiter un sujet, de vérification des faits, de prendre des points de vue contraires, d’écouter toutes les parties, etc. », écrit le site burkinabé d’information, LeFaso.net.
La communication de guerre ne saurait suppléer le travail journalistique. « Liberté de la presse et communication de guerre : l’impossible cohabitation ! », affirme pour sa part le quotidien Aujourd’hui.
Le Collectif des journalistes, activistes et leaders d’opinion victimes de menaces au Burkina a publié une tribune sur le site d’information WakatSéra : « La critique ou la contradiction ne sauraient devenir des délits voire des crimes passibles de menace de mort ou de toute autre forme de persécution, de harcèlement et de violence », affirme ce collectif qui appelle les autorités « à préserver la quiétude et la sécurité du secteur des médias et de ses employés ».
Ce collectif des journalistes rappelle enfin que « le Burkina Faso est un État de droit démocratique dont la constitution en son article 8 donne le droit de s’exprimer librement et aux journalistes d’informer les populations au nom de leur droit à l’information ». Beaucoup d’observateurs d’accordent sur le fait que l’exercice du journalisme au Burkina Faso, tout comme dans d’autres pays du Sahel, est soumis à un nouveau diktat.
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